Mardi 9 février 1999     KUNDARA - KOUNSITEL

A 18 heures, nous arrivons à KUNDARA. Problème d'argent. On doit changer nos derniers dollars US et partir au plus vite vers KOBE où une banque nous attend. On enchaîne donc et à 19 heures, on reprend un taxi pour la prochaine étape : GAOUAL. La piste est en très mauvais état. On respire le moins possible à cause de la poussière. On en est couverts de la tête aux pieds. On met plus de 4 heures pour seulement 10 kilomètres. Il est 23 heures 15 lorsque nous entrons dans le village de KOUNSITEL.

Le chauffeur préfère passer la nuit ici car GAOUAL est le repère de nombreux voleurs. Il ne reste pourtant plus que 17 kilomètres à parcourir ! Le chef de la Police nous accueille dans une case pour la nuit. Nous la partageons avec un autre policier. Au loin, on entend la musique des tam-tams. Et à partir de 1 heure du matin, c'est particulièrement bruyant.

Mercredi 10 février 1999     KOUNSITEL - BOKE

Vers 7 heures 30, nous quittons le village pour arriver une heure plus tard à GAOUAL. A 9 heures 30, un autre véhicule est déjà prêt et nous poursuivons vers BOKE. On n'a qu'une hâte, une bonne douche. La piste est mieux qu'hier mais avec beaucoup de passages difficiles. Les paysages sont plus verts et moins plats qu'au SENEGAL. La piste rouge serpente dans une végétation abondante à travers laquelle on peut distinguer les petits villages de cases. Des singes traversent..

A l'arrêt dans un gros village, des gamins encerclent la voiture pour nous observer de plus près. C'est rapidement l'attroupement, tout le monde rigole ! Encore des postes militaires. Des gendarmes veulent immobiliser la voiture. Motif : le chauffeur n'a ni papiers d'identité, ni permis de conduire, ni documents du véhicule. En plus, il n'a pas un comportement qui leur convient ! L'amende est fixée à 40000 Francs Guinéens, soient environ 200 Francs Français. On s'assieds, on discute, personne ne veut céder. Bien sur, le coin ne peut pas être plus isolé, en pleine brousse, avec un trafic quasi nul. Chacun prend son mal en patience, sans s'énerver.

En Afrique, la dernière chose à faire est bien de s'énerver. Les gendarmes, étonnés de voir deux blancs voyager dans de telles conditions se montrent curieux et sympathique à notre égard. On leur raconte nos aventures et lorsque nous leur annonçons que depuis 3 jours la poussière s'amoncelle sur nos corps, ils accordent au chauffeur le droit de reprendre la piste en insistant sur le fait que c'est uniquement parce que nous avons bien besoin de nous laver.

A un autre contrôle, autre problème : un gendarme remarque une anomalie sur les passeports de 2 autres passagers. Ils finissent par laisser un peu d'argent et tout s'arrange. La chaleur est difficile à supporter. A 15 heures, arrivée à BOKE. On trouve une chambre dans une sorte de club de sport pour environ 2,50 Francs Français. Mais oh déception, pas d'eau courante ! On se renseigne partout pour savoir où nous pourrions trouver une douche, une vraie. Dans la rue, surs les conseils de plusieurs personnes, nous allons à l'hôpital. Tout crasseux, on a honte de demander s'il nous est possible de prendre une douche. Finalement, un médecin finit par nous apporter des sceaux d'eau dans une chambre.

Jeudi 11 février 1999     BOKE - CONAKRY   (5 heures 30 - 262 kms)

Dès 8 heures, nous sommes à la banque. Malgré notre insistance, ils refusent de changer nos devises. Nous voilà sans le moindre sou. Nous ne pouvons même pas payer la chambre en totalité. Et comment quitter la ville ? On s'arrange avec un chauffeur de minibus qui accepte que nous le payons une fois à CONAKRY, à condition d'arriver avant la fermeture des banques. A 10 heures 30, départ. La route est goudronnée, plus de poussière, on est juste un peu serrés mais ça, on a l'habitude. A Boffa, on utilise un bac pour franchir la rivière et l'on nous paye le passage. A 16 heures, arrivée à la capitale. Il était temps, la banque allait fermer. On rembourse nos dettes, on est riches et sacs au dos, on se met à la recherche d'un hôtel, le moins cher possible. On n'a rien mangé depuis hier, on est complètement crevés, à plat, soif ! On trouve enfin une chambre confortable avec douche.

Vendredi 12 février 1999     CONAKRY

Dans chaque capitale, il faut penser à la suite du voyage et planifier le prochain pays à traverser. Ce matin, nous allons à l'ambassade de Côte d'Ivoire pour les prochains visas. Puis on essaie de trouver un endroit moins cher pour loger. mais apparemment, notre hôtel est déjà le moins onéreux et pour un excellent confort. Dans les grandes villes, les prix sont toujours plus élevés. L'après-midi, balade en ville, coup de téléphone rapide en France, lessive, apéritif, repas et dernier coca cola dans un bar. Quel bien cela fait de pouvoir se détendre, se sentir propres, avoir un endroit confortable pour la nuit après ces longues journées de route entassés dans de petites voitures qui tombent régulièrement en panne, secoués, couverts de poussière et sous une chaleur atroce.

Samedi 13 février 1999     CONAKRY

Le lendemain, visite du seul bâtiment moderne de la ville et le plus luxueux : l'hôtel Novotel. Partout ailleurs, délabrement total. Tout est construit n'importe comment. Ça ne ressemble en rien à une capitale. Malgré tout, notre chambre climatisée constitue notre oasis qui nous permet d'échapper à la chaleur et l'humidité.

Dimanche 14 février 1999     CONAKRY

Aujourd'hui, nous voulons prendre un bateau pour visiter une île, au large de CONAKRY. Par chance, nous rencontrons au port une famille Libanaise qui nous propose de partager les frais d'une pirogue pour passer la journée sur un petit îlot. Après une demi-heure de traversée, nous accostons sur une petite plage ombragée de cocotiers. Ici, quelques familles se partagent des abris de branchages. On se balade sur les rochers, on savoure le plaisir de nager dans la mer chaude et claire, puis on apprécie le bon repas que nous offre de partager la sympathique famille de Libanais. Vers 17 heures, retour vers la vie trépidante de CONAKRY.

On décide de passer une dernière journée ici, et on la veut reposante. Le matin, nous récupérons passeports et visas à l'ambassade de COTE D'IVOIRE, puis consultation internet. Voilà une belle invention qui nous permet de communiquer rapidement avec tous nos amis, sans subir le coût des communications et les nouvelles de FRANCE sont toujours bienvenues. L'après-midi, baignade à la belle piscine du Novotel. Le pied !

Mardi 16 février 1999     CONAKRY - PITA   (8 heures - 300 kms)

A la gare routière, tous les chauffeurs nous agrippent pour qu'on prenne leur véhicule. Notre choix se porte sur un taxi à 6 places (les tarifs sont les mêmes partout). A 9 heures, départ difficile en poussant la pauvre voiture dont la mécanique semble bien fatiguée. En effet, quelques kilomètres plus loin, il faut déjà s'arrêter dans un garage afin de refaire certains réglages.

Nous zigzaguons dans les montages, au travers de paysages boisés, tout en traversant de petites villes. Mais les contrôles de Police nous font perdre du temps. D'autant que nous sommes 2 par siège et la chaleur est étouffante. A 17 heures, arrivée à PITA. On loge au centre d'accueil, dans une grande chambre avec douche. La soirée est fraîche et agréable.

Mercredi 17 février 1999     PITA - LABE   (1 heure - 30 kms)

Il parait que des chutes d'eau toutes proches valent le détours. De bonne heure, nous allons donc à la Police pour demander une autorisation écrite nécessaire pour se rendre sur les lieux. Le commissaire nous signe un petit papier. A pieds, nous parcourrons environ 7 kilomètres à travers collines et villages, dans la brousse. En chemin, nous rencontrons un Français, un baroudeur qui sillonne l'Afrique à pieds. Nous poursuivons ensemble. Un militaire contrôle notre autorisation. Les fameuses chutes sont difficiles à trouver. Notre ami nous quitte, il ne veut pas perdre plus de temps.

Alors que nous sommes sur le point de faire demi-tour, les cascades apparaissent. c'est chouette et rafraîchissant. Au retour, le soleil tape fort. A 14 heures 30, nous sommes de retour à PITA. Un coca bien frais nous désaltère, puis il est temps de récupérer les sacs et prendre un taxi pour LABE.

Une fois de plus, il est temps d'arriver à destination, la voiture est "out". Aucun mal pour se trouver un petit hôtel pas cher, ce qui nous laisse du temps pour la visite de la ville et une balade au marché.

Jeudi 18 février 1999     LABE - DABOLA

A 7 heures 45, nous sommes à la gare routière. Durant 4 longues heures, c'est l'attente. Une fois partis, ça roule bien. Les contrôles de police sont rares et rapides. La route est toujours montagneuses. Décidément en Afrique, on aime les contacts humains. Nous sommes en tout 8 dans la petite voiture : 4 à l'avant, 4 à l'arrière. Dans un village, c'est jour de marché. Notre conducteur roule vite. Il évite de justesse une vache mais ne peut éviter un enfant qui jouait sur la route. Le choc est violent, le gamin est projeté par dessus la voiture. On descend aussitôt. Une marée humaine encercle la voiture en hurlant. Affolement général, les gens sont comme fous. On ne peut que se tenir à l'écart. Le gamin est mis à l'arrière, en sang et inconscient, le chauffeur échappe de peu au lynchage, il démarre en vitesse. Le conducteur d'un 4x4 pick-up nous fait signe de grimper. Nous nous retrouvons assis sur des sacs d'oignons. Du coup, on a perdu les autres passagers, le taxi, nos sacs. Où allons nous les retrouver ? DABOLA est la ville la plus proche, à 60 kilomètres de l'accident. Notre taxi est obligé de passer par là. On attend en repensant à la scène. La nuit est tombée, il aurait du arriver depuis longtemps. On se renseigne un peu partout.

On finit par aller à la police qui nous aide de son mieux en allant voire le chef du syndicat des transports. Celui-ci transmet le numéro de la plaque à tous les chauffeurs de taxi présents. sans nos sacs, nous sommes perdus ! Après tout, c'est en quelque sorte notre maison. Puis on nous conduit dans un hôpital équipé d'une radio. Bien sur, elle ne fonctionne pas. On retourne donc patienter à la gare routière, très inquiets. A 20 heures, notre voiture arrive enfin, avec nos sacs et les autres passagers. Le conducteur nous rassure, l'enfant va bien, il a repris connaissance, il n'a rien de cassé. Ouf. Bon, il ne manquait plus que nous, on peut repartir et nous poursuivons comme si rien ne s'était passé. Ah, nous reprenons la piste et la poussière... Il reste une rivière à traverser mais il est maintenant trop tard pour le bac. Pas démoralisé, le chauffeur étend une grande bâche sur laquelle tout le monde peut s'allonger. Mais il fait trop froid. Un boui-boui est ouvert, on prend un café et on discute toute la nuit pendant que autour de nous, tout le monde ronfle. Ainsi, durant 8 heures, on reste bien sagement sans bouger, au froid, à attendre le lever du jour. Galère !

Vendredi 19 février 1999     ARRIVEE KANKAN

Vers 8 heures 15, nous somme les premiers à prendre le bac. La piste continue. Puis à 10 heures 30, nous nous "posons" dans un petit hôtel. On y est bien mais il manque l'eau courante. Et nous qui rêvions d'une douche. A la place, on a des sceaux. KANKAN est une petite ville vivante, avec un grand marché coloré. Non sans mal, on réussit à changer nos travellers chèques. Au début c'est un refus mais en faisant notre numéro de fauchés "mais comment on va faire ???", on parvient à nos fins. Une envie de bière nous prend. Et pourtant on n'en boit jamais ! On fait toutes les boutiques mais c'est peine perdue puisque nous sommes dans région où la religion musulmane domine. En revanche, nous découvrons par hasard une station service "ELF" qui dispose d'une douche, une vraie, gratuite. On courre chercher serviettes et savon ! Le soir, très tôt, tout semble endormi. Personne dans les rues, le marché est totalement déserté, comme au lendemain d'une guerre. Pas moyen de trouver le moindre petit boui-boui pour manger.

Samedi 20 février 1999     KANKAN - KEROUANE

A 7 heures 45, nous sommes prêts, déjà à la gare routière. Plus qu'à attendre que le minibus soit complet. Nous sommes assis sur un banc, et les heures ne passent pas vite. A 10 heures, le bus n'est toujours pas plein. Que c'est long. Il commence à faire bien chaud. A 13 heures, enfin les bagages sont ficelés sur le toit. Plus qu'à s'entasser. Le chauffeur nous place, tout le monde doit être "casé" dans cette boîte à sardines roulante. Dernière halte en ville pour le plein d'essence, puis on prend la piste. Dans le minibus, 22 personnes + 1 sur le toit ! On traverse de nombreux villages, la région est boisée. Les ennuis mécaniques sont également fréquents. A KEROUANE, contrôle de police. Evidemment, le conducteur n'es pas en règle, il doit payer une amende. Ainsi, on passe une demi-heure au poste. Et dans la même ville, il faut encore patienter une heure pour réparer quelque chose. C'est énervant. La nuit est tombée. Puis on repart. La piste est mauvaise, on est secoués et le chauffeur fonce pour rattraper le temps perdu. D'un coup, le bus bondit, on sent un frottement anormal contre la roue et une odeur de brûlé. L'essieu est cassé ! Il fait froid, on s'assied par terre. 3 heures de réparations, durant lesquelles on attend dans le noir, loin de tout. Vers minuit, on repart, mal installés, sans pouvoir remuer tant on est serrés.

Dimanche 21 février 1999     SEREDOU - SIPILOU

A 7 heures, arrivée à SEREDOU. Autre arrêt de 3 heures pour les réparations. Même pas moyen de prendre un café ou un thé, il n'y a rien. Des femmes préparent de grandes marmites de riz et du manioc. Il faut aimer ! A 10 heures, le minibus peut de nouveau rouler. Fini la piste, on retrouve le goudron. On est tellement sales et fatigués. A 12 heures, nous arrivons à NZEREKORE. On hésite à s'arrêter là pour la nuit mais finalement, la frontière n'est pas loin et on décide d'enchaîner.

A 13 heures, changement de minibus. On joue à nouveau les sardines. Encore des contrôles de police. De nouveau, le chauffeur n'est pas en règle. Et hop, nous voici bloqués. Heureusement, les flics trouvent que nous avons une bonne tête. Comme ils ne veulent pas nous pénaliser, ils libèrent le véhicule. On se retrouve sur les pistes à respirer la poussière. A la frontière, les formalités sont rapides, les douaniers sympas.